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  • Joie de vivre et merguez-frites

    Des mois que j’ai abandonné ce blog, pensant que je n’avais rien à dire de spécial, pas de plus-value à apporter dans un univers de blogging qui se professionnalise de plus en plus, avec une attente des lecteurs que je suppose ne pas pouvoir satisfaire. En effet je ne propose ni concours ni « give-away », ni partenariat avec des marques. Les quelques fois où je parle livres, c’est rarement en rapport avec l’actualité littéraire, et je ne fais gagner ni shampoing ni le dernier mascara à la mode. Alors je ne voyais plus trop l’intérêt de vous bassiner avec mes états d’âme.

    Avant de comprendre vendredi soir, que ce blog est avant tout un déversoir pour mes états d’âme, justement. Un endroit que j’ai ouvert, il y a bien longtemps, pour parler de tout ce qui peut me traverser la tête et qui ressent le besoin d’en sortir.

    Je vous ai épargné cette année mon avis éclairé sur le nouvel album d’Adèle (pitié mais qu’elle arrête de parler de son ex !) ; j’ai aussi gentiment gardé pour moi mon opinion sur le scandale qui a fait de Friends la soi-disant meilleure série de tout les temps (manifestement le jury n’a jamais entendu parler de Dream On ou de Buffy) ; j’ai aussi retenu mon envie de vous écrire tout le mal que je pensais de Charlotte, tant ce roman de Foenkinos avait été finement analysé par de plus talentueux que moi (mais pour résumer : quelle daube !)

    J’ai un instant pensé reprendre le clavier pour parler de ma nouvelle lubie, la broderie japonaise, tant ça n’intéresse personne à part moi.

    Et pourtant, c’était bien la fonction de ce blog que de servir de dérivatif : faire dériver les mots de mon cerveau à une page, pour m’en libérer.

    Depuis vendredi j’ai besoin d’être libérée de certains mots, et de la tristesse aussi.

    Quand la terreur frappe à quelques mètres de la porte, il faut pouvoir le dire quelque part, sans attendre de réponse, juste le dire, et s’en débarrasser, comme d’un fardeau importun.

    Mon quartier a été touché, vendredi, violenté et désacralisé. Cette idée du chez soi, qui s’étend hors des murs aux rues et aux endroits que l’on fréquente par habitude, a été forcée, comme on force une porte. Après, ce n’est plus pareil. Je ne peux m’empêcher de penser que trois hommes (de si jeunes hommes), se sont fait exploser, dans ces rues, que l’on emprunte si souvent. Il ne nous est rien arrivé à nous. Rien. A part la peur, la certitude que « cela aurait pu », l’immense tristesse des 129 morts et des blessés. Rien qu’un traumatisme partagé avec le pays. Rien que la terrible proximité géographique.

    Et puis j’entends à nouveau mon fils, qui me réclame comme chaque soir de match au Stade de France, d’aller acheter une barquette de frites et des merguez. Cet enfant est un ogre sur pattes en ce moment : la nourriture est sa priorité (avec les Pokemons et les Lego, tryptique fédérateur de beaucoup de gamins de 10 ans je crois). Et moi, comme je suis une vilaine maman et que parfois j’ai la flemme, je dis juste, non, pas de MacDo, ni de merguez-frites d’abord j’ai fait une super soupe de courgettes. Je ne vous raconte pas la tête du gamin à l’idée de manger une soupe de courgette quand s’amène à lui la douce odeur du merguez-frites.

    C’est idiot, mais j’ai hâte d’être au prochain match, concert, pour sortir avec lui et déguster une merguez-frites dans du pain trop vieux, avec une serviette en papier trop petite, dans la joie et le gras.

    Elle avait un gout trop amer, la soupe de courgette, vendredi soir.