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La poésie, la terre et le souvenir - Mahmoud Darwich

J’entends souvent que la poésie, ça ne sert à rien, que les poètes n’ont pas d’autres pouvoir que celui de distraire de la réalité.

Je ne suis évidemment pas d’accord.

Les poètes sont là pour nous rappeler notre condition d’ Homme, pour chanter la terre et nous montrer la beauté, mais aussi l’injustice.

Les poètes nous disent de ne pas oublier.

Les poètes exaltent la mémoire et la liberté.

Les poètes rappellent que face à toutes les dénégations des puissants, on peut crier « j’existais, et j’existe encore. »

Avec Mahmoud Darwich, poète palestinien, j’aimerai rappeler à certains, prompts à refaire l’histoire, que la Palestine existait avant 1948, qu’elle avait une Histoire, des traditions, et des poètes.

Une citation de ce grand écrivain, dont on célèbre aujourd’hui la naissance, dit toute la nécessité de la poésie :  "Sans doute avons-nous besoin aujourd’hui de la poésie, plus que jamais. Afin de recouvrer notre sensibilité et notre conscience de notre humanité menacée et de notre capacité à poursuivre l’un des plus beaux rêves de l’humanité, celui de la liberté, celui de la prise du réel à bras le corps, de l’ouverture au monde partagé et de la quête de l’essence. "

 

Palestine, Gaza, Mahmoud Darwich, Sodastream exploite des terres occupées illégalement, sodastream c'est de la merde

Pour finir, un de mes poèmes favoris, par sa force et sa colère, et aussi par l’espoir indicible qu’il porte:

 

Identité

Inscris !
Je suis Arabe
Le numéro de ma carte : cinquante mille
Nombre d’enfants : huit
Et le neuvième. . . arrivera après l’été !
Et te voilà furieux !

Inscris !
Je suis Arabe
Je travaille à la carrière avec mes compagnons de peine
Et j’ai huit bambins
Leur galette de pain
Les vêtements, leur cahier d’écolier
Je les tire des rochers. . .
Oh ! je n’irai pas quémander l’aumône à ta porte
Je ne me fais pas tout petit au porche de ton palais
Et te voilà furieux !

Inscris !
Je suis Arabe
Sans nom de famille – je suis mon prénom
« Patient infiniment » dans un pays où tous
Vivent sur les braises de la Colère
Mes racines. . .
Avant la naissance du temps elles prirent pied
Avant l’effusion de la durée
Avant le cyprès et l’olivier
. . .avant l’éclosion de l’herbe
Mon père. . . est d’une famille de laboureurs
N’a rien avec messieurs les notables
Mon grand-père était paysan – être
Sans valeur – ni ascendance.
Ma maison, une hutte de gardien
En troncs et en roseaux
Voilà qui je suis – cela te plaît-il ?
Sans nom de famille, je ne suis que mon prénom.

Inscris !
Je suis Arabe
Mes cheveux . . . couleur du charbon
Mes yeux . . . couleur de café
Signes particuliers :
Sur la tête un kefiyyé avec son cordon bien serré
Et ma paume est dure comme une pierre
. . .elle écorche celui qui la serre
La nourriture que je préfère c’est
L’huile d’olive et le thym

Mon adresse :
Je suis d’un village isolé. . .
Où les rues n’ont plus de noms
Et tous les hommes. . . à la carrière comme au champ
Aiment bien le communisme
Inscris !
Je suis Arabe
Et te voilà furieux !

Inscris
Que je suis Arabe
Que tu as raflé les vignes de mes pères
Et la terre que je cultivais
Moi et mes enfants ensemble
Tu nous as tout pris hormis
Pour la survie de mes petits-fils
Les rochers que voici
Mais votre gouvernement va les saisir aussi
. . .à ce que l’on dit !

DONC

Inscris !
En tête du premier feuillet
Que je n’ai pas de haine pour les hommes
Que je n’assaille personne mais que
Si j’ai faim
Je mange la chair de mon Usurpateur
Gare ! Gare ! Gare
À ma fureur !

 

Mahmoud Darwich, Inscris « Je suis Arabe »

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