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  • La Peur - Théatre Michel

    La Peur est un des romans les plus puissants de Stefan Zweig : il concentre une telle intensité dans les tourments de l’héroïne.

    Cette intensité, on peut la retrouver actuellement sur les planches, à Paris puisque le Théâtre Michel en présente une adaptation, mise en scène par Elodie Menant.

    Sur scène, le ballet des angoisses et du suspens est habilement mené par un trio d’acteurs au fait des subtilités que requièrent leurs personnages.

    L’histoire, nous la connaissons tous, c’est celle d’une femme bourgeoise, qui trompe son mari par ennui et délaissement, mais certainement pas par désaffection. Et c’est ce paradoxe qui gagne l’observateur à la cause de cette femme, Irène.

    Un jour, la femme adultère se retrouve face à ses propres errements, quand une inconnue vient la voir, la menacer, la faire chanter. Irène ne vit plus que dans l’angoisse que le mari qu’elle aime apprenne son erreur. C’est cette montée inexorable de l’angoisse que j’ai pris plaisir à voir sur scène, sous les traits d’Hélène Degy, magnifique Irène. On la regarde plonger dans cette peur qui est comme un personnage jumeau qui vient grimper sur ses frêles épaules. Face à Hélène Degy, l’acteur qui campe le mari, Aliocha Itovitch, joue la distance, la froideur, le désintérêt, et sait être suffisamment antipathique pour que le spectateur se range tout entier du côté d’Irène, et prend peur avec elle.

    La comédie des sentiments mélange moments de grâce et coup de grâce : c’est l’effet Zweig, les personnages ne sont jamais uniquement ce qu’on voit d’eux au premier abord. Et cette profondeur se retrouve sur scène, aussi bien dans le jeu des acteurs que dans les subtilités de la mise en scène. Décors et mouvements suivent les contours mentaux des personnages : l’ennui d’Irène, puis ses angoisses, sa solitude jusqu’à la folie, on retrouve tout ça dans les choix de décors et de mise en scène, sans que cela paraisse « fabriqué ».

    Un joli moment de théâtre à passer.

     

     

    La Peur – Théâtre Michel

    Le jeudi, vendredi et dimanche à 19h

    Le samedi à 19h15

    Jusqu’au 20 mai 2017 

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  • Tamara - Alexandre Castagnetti

    Parmi les bandes dessinées qui circulent à la maison, il y a Tamara, production franco-belge, qu’il m’arrive de piquer à mon fils (hélas, je pense trop rarement à lire de la bande dessinée, et le plus souvent j’emprunte à mon fils.)

    Tamara est une ado comme les autres, qui vit avec sa mère et le compagnon de celle-ci, un musicien brésilien, ainsi que la fille de ce dernier. Tamara est comme tous les ados, ou, si ce n’est qu’elle traine quelques kilos en trop, dont le poids est encore augmenté par les complexes et les moqueries engendrés.

    Tamara n’est pas pour autant une petite chose fragile et effacée, c’est une fille qui a du caractère, une langue acérée quand il faut et des envies de grand amour.

    C’est cette héroïne qu’on retrouve à l’écran, sous les jolis traits d’Héloïse Martin, dans le gros pull rouge que les lecteurs de la BD n’auront aucun mal à reconnaître.

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    Tamara n’est pas franchement bien dans sa peau : la faute aux kilos en trop, certes, mais surtout à la méchanceté et aux remarques cruelles de ses camarades. Pour autant, elle ne se résigne pas et répond avec ironie et ne se laisse pas faire. Elle peut compter sur le soutien de sa meilleure amie, Jelilah, jouée à l’écran par Oulaya Amamra (future Césarisée pour son rôle dans Divines)

    Tamara tombe amoureuse d’un nouvel élève, et fera tout pour le faire succomber. Elle peut compter sur l’aide de Jelilah pour l’aider à traverser les obstacles de sa vie d’ado complexée, les histoires de familles, les plans qui ne se passent jamais exactement comme on le souhaite, les rivalités entre amis, et les malentendus.

    C’est une comédie familiale, au meilleur sens du terme : riche en émotions, drôle, réaliste et joyeuse malgré tout. Je l’ai regardé avec mon fils de douze ans, lecteur de la bande dessinée, qui a bien aimé, qui a ri à de nombreuses reprises, de ce rire franc qui ne s’arrête pas (et que j’adore entendre !).

    C’est une comédie moderne, dans l’air du temps (qui convoque Facebook, les smartphones, et toutes les situations comiques que cela peut générer), et qui joue avec talent sur le décalage parents/enfants. Des points de vue différents, des peurs et des désirs qui s’opposent parfois, mais rien que l’amour d’un parent ne peut surmonter.

    Bref, un vrai divertissement familial, qui peut même susciter la discussion après coup avec son ado, sur la vie à l’école, les amourettes, les peurs, et tout ce qui peut leur traverser la tête.

    À voir, en famille !

     

    Tamara – Réalisation de Alexandre Castagnetti

    Disponible en VoD

  • Les Pièges de l'Exil - Philip Kerr

     Il y a des personnages de roman qu’on prend plaisir à retrouver, comme un vieil ami. Bernie Gunther est un de ces vieux compagnons de lecture, que l’on suit depuis maintenant onze volumes !

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    J’ai connu le héros de Philip Kerr avec la Trilogie Berlinoise, lu d’une traite tellement c’était passionnant. Un héros égal de Philip Marlowe et Sam Spade, à l’époque sombre et agitée du Nazisme : c’était très tentant. Au roman de détective classique, avec son univers de marlous et de femmes fatales, Philip Kerr a ajouté une bonne dose d’histoire et de politique, pour un mélange qui rend accro les lecteurs.

    C’est un pari que de faire tenir du roman policier dans une période aussi glauque, sans faire de son héros un cliché du Mal ou du Bien. C’est ce que j’ai aimé avec Bernie Gunther : observer un ex-flic reconverti dans le privé, se frotter au double problème de sa profession particulière, et de la situation politique de son pays. Tout en nuances et d’un réalisme historique admirable, les romans mettant en scène Bernie Gunther abordent l’histoire de l’Allemagne depuis la montée de Hitler, jusqu’à la chute de son régime, la construction du mur de Berlin et l’après guerre.

    On retrouve donc notre héros en France, début des années cinquante, reconverti en tant que concierge d’un hôtel à Saint-Jean-Cap-Ferrat : les activités de Gunther dans l’Allemagne Nazie ont laissé des traces, et même s’il est loin d’avoir été un serviteur du Reich, Gunther se retrouve sur une liste de criminels nazis (ce qui est ma foi fort ironique quand on a lu toutes ses aventures… mais je vous laisse le plaisir de les découvrir.)

    Bref, Bernie s’ennuie sur la Côte d’Azur, et franchement je le comprends, c’est depuis toujours un repaire de petites dames âgés et d’anglais mortifères. Mais heureusement sa route va croiser celle d’un anglais tout sauf ennuyeux: rien moins que Somerset Maugham, l’écrivain (le roi de la nouvelle, pas ennuyeux du tout !), mais aussi espion de la Couronne. Et c’est en tant qu’ex-espion que Somerset se retrouve dans l’embarras, embarras duquel notre bon Bernie va tenter de le sortir, au risque de compromettre sa propre sécurité.

    On a donc là tout les ingrédients d’un bon polar : paysage, femme fatale, personnages troubles, jeux de dupes et mystère, le tout sous la menace d’un danger permanent.

    J’ai adoré retrouvé ce personnage. J’aime sa façon de traverser l’Histoire, de naviguer entre les mensonges des uns et ses propres illusions. J’aime infiniment sa mélancolie, qui confine à une forme de détachement et de fatalisme, tout en élégance.

    Encore une réussite de Philip Kerr, tant sur le plan de l’intrigue que de la représentation historique.

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    Les Pièges de l'Exil - Philip Kerr

    Éditions du Seuil - Traduction de Philippe Bonnet

    400 pages - 22€

  • Exposition Jardins - Galeries du Grand Palais

    Se promener dans un beau jardin n’est pas loin d’être un avant-gout du Paradis. Que l’on soit croyant ou pas. En fait, le bonheur est une question de promenade, et de pensées qui se perdent. Où se perdre mieux que dans un jardin, si ce n’est dans un livre ? Lire et flâner dans un jardin, ce sont deux formes de plaisirs qui se complètent, et s’il faut convoquer Cicéron pour s’en convaincre, convoquons et convainquons : “Si vous possédez une bibliothèque et un jardin, vous avez tout ce qu'il vous faut.”

    Las, je n’ai pas de jardin. Enfin, pas chez moi. Ce qui me fait dire que j’ai en échange tous les jardins de Paris, et tous ceux que le hasard met sur mes pas.

    Je n’ai pas eu à aller bien loin, hier soir, pour découvrir un monde de jardins et de couleurs.

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    Le jardin est un art, et la nouvelle exposition du Grand Palais nous en offre une belle palette.

    L’exposition, sobrement intitulée Jardins, est une promenade (nous y voilà donc) parmi les œuvres de Klimt, Matisse, Cézanne, Monet, Dürer, Picasso, et quelques autres encore. Chacune offre à l’œil curieux du visiteur sa propre version du Jardin, comme lieu de plaisir, de promenade, de réflexion, et comme lieu de construction artistique.

    A travers les différentes thématiques abordées, et suivant la période historique, on regarde le Jardin comme objet et puis comme sujet, en constante évolution (suivant en cela les nouveautés et progrès de chaque époque). On observe ainsi les mille usages du Jardin, tour à tour lieu romantique et de badinerie, laboratoire expérimentale d’une nouvelle prise de conscience écologique, ou grand œuvre presque mathématique de jardiniers passionnants.

    Le promeneur trouvera des fêtes galantes sublimées par Fragonard ou Vrancx, il trouvera aussi la géométrie parfaite des jardins à la française, ou bien le fouillis végétal de Gilles Clément. On pourra rêver devant les marguerites de Caillebotte ou la superbe installation de Jean-Michel Othoniel : Grotta Azzura.

    Le jardin est chargé de désirs et de fantasme. Tour à tour on s’y abandonne et on souhaite le maitriser. Mais on sait bien qui aura toujours le dernier mot : la nature.

     

    Si vous ne me suivez pas sur Instagram, vous avez du échapper au déluge de photos que j’ai déversé hier soir ^^ Mais n’hésitez pas à aller regarder, cela vous donnera peut-être envie d’aller visiter ce jardin.

     

    Exposition Jardins

    Galeries du Grand Palais

    Du 15 mars au 24 juillet 2017

     

     

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    Fresque à Pompéi

     

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    Herman de vies

     

     

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    Philipp Otto Runge

     

     

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    Gustave Caillebotte, parterre de marguerites

     

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    Odilon Redon, la branche fleurie jaune

     

  • Recette pour une journée sans banana bread

    C’est toujours intéressant de parler de soi, non ? Peu importe, considérez que je parle à voix haute. Le problème c’est que je pense trop, à des tas de choses inutiles, superflues, envahissantes, et inutiles surtout.

    Autant les partager (tant pis pour vous, pauvres lecteurs perdus par ici).

    Je n’ai jamais fait de banana bread. Je n’ai jamais de bananes assez mûres. Les fruits sont toujours mangés très vite chez moi.

    Je pense souvent à Leonard Cohen en ce moment, à cause de sa chanson Who By Fire. Elle m’obsède un peu, genre depuis six mois, et là ça commence à faire long, je ne sais pas si je dois en parler à quelqu’un en particulier.

    Je n’ai jamais mangé de banana bread. Pas encore eu l’occasion, et jamais croisé de boulangeries qui en vendent. En même temps je n’aime pas la banane cuite. Ceci explique cela ? Un évitement consciencieusement inconscient ?

    J’ai trop de lubies à gérer en ce moment. C’est comme des petits parasites qui viennent, heu parasiter ? mes journées. Quoique j’exagère, je les gère tellement mieux qu’avant.

    Exemple de lubies ? Tu ne veux pas vraiment savoir, mais moi je ne t’épargne pas. Je cultive mes obsessions, jalousement, comme autant de tares à laquelle je tiens précieusement.

    J’ai la lubie des livres qui contiennent le mot Leviathan, alors je les lis tous, du moins j’essaie. Depuis le Leviathan de la Bible, au Leviathan de Paul Auster, en passant Par Thomas Hobbes ou Julien Green. Mon monde s’éclaire quand j’en découvre un nouveau à lire.

    Je suis obsédée par les livres dont le titre contient American quelque chose. Même punition : je cours après les American Psycho, les American Pastoral, American Darling, American Rhapsody, et tous ceux qu’il me reste encore à lire.

    Je devrais peut-être acheter des bananes, les laisser mûrir et faire ce fichu banana bread histoire d’évacuer le problème une fois pour toutes.

    Je pense souvent à certaines actrices, elles ne sont pas mortes, si ce n’est pour le cinéma contemporain, qui les ignore complètement. Je pense souvent à Gabriel Anwar et à son parfait pas de danse avec Al Pacino dans Le Temps d’un Week-end. Je pense aussi souvent à Phoebe Cates, et aussi à Geneviève Bujold et Ali McGraw.

    Tiens, elles sont toutes brunes. N’y voyez rien de définitif.

    Je pense souvent que les paroles de Who By Fire sont exactement ce que je voudrais entendre en ce moment même, alors je l’écoute (merveille de l’internet, tu consommes instantanément tes désirs) (notez que je n’ai pas cédé au désir (brûlant) de faire un jeu de mots à base de désirs qui se consument dans le consumérisme (trop attendu) (mais tentant))))

    Je crois que je relie cette envie de banana bread à quelqu’un qui en fait souvent et que j’aime bien, de loin. Je crois que je voudrais qu’elle me dise, viens, j’ai fait un banana bread, viens à la maison en goûter un morceau avec moi. (Je crois que je mets trop de sentimentalisme dans ce banana bread, je serais forcément déçue (c’est une sorte d’ostie, une communion avec quelqu’un que je ne mérite peut-être pas (il faut dire que je suis loin d’être l’amie idéale) (distante, timide, recluse dans un monde imaginaire))))

    La dernière fois que j’ai ressenti l’assaut d’une lubie, c’était avec la couleur jaune. Il me fallait tout en jaune (une robe, un sac, un livre (n’importe quel livre avec une couverture jaune soleil suffisait à mon bonheur (pas reluisant pour une lectrice exigeante (ouais non, exigeante oui et non, je suis à géométrie variable, question exigence) une paire de chaussures, une broche, n’importe quoi de jaune m’emplissait de joie (je crois sincèrement que la couleur de la joie est le jaune)))))

    Quand j’aime une chanson je peux l’écouter cent fois d’affilée : ce n’est pas une figure de style, je l’écoute cent, deux-cent fois, jusqu’à en gaver chacune de mes cellules, et même alors je ne m’en lasse pas, et il ne me reste plus qu’à pleurer d’incompréhension (parce que je ne comprends pas ce qui se passe, je suis juste effarée par ma propre obsession et par ce qu’elle peut cacher ou révéler (rien ? allez savoir))

    Avez-vous parfois des révélations sur vous-même ? J’aime bien ce mot, révélation (tiens, cherchons voir s’il n’y a pas quelques dizaines de bouquins à lire contenant le mot Révélation) (nous voilà à nouveau au bord du gouffre du n’importe quoi) (enfin, nous, moi surtout, et évidemment je ne reculerai pas (je vous tiens au courant de la liste des livres « Révélation », si vous insistez)

    Pardon mais j’en reviens à ce banana bread : comment m’en débarrasser ? Dois-je filer chez Starbuck en acheter un, l’engloutir et constater le goût amer de la déception ? Parce que forcément ce sera décevant, ce ne sera pas LE banana bread, ce plat qui mérite un cérémonial ne saurait être assimilé à ce truc vendu par une multinationale qui deal du sucre sous forme de café. Ça ne se peut.

    Je me rends compte que la banane est un fruit jaune, comme le bonheur.

     

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