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amélie nothomb

  • (Sainte) Pétronille et la palme du martyre (littéraire)

    Encore un ouvrage de cette rentrée littéraire. Cette fois-ci, le traditionnel Amélie Nothomb. Pas une rentrée littéraire sans un ouvrage de la dame.

    Traditionnel donc, et dispensable.

    Pourtant je l’ai lu, histoire d’être vraiment certaine qu’il est, comme tous les ans, dispensable, et le fruit de la même blague : « que pourrais-je écrire d’encore plus inabouti, d’encore plus grotesque et qui se vende comme des petits pains ».

    Le roman s’ouvre sur un passage pas inintéressant sur l’état d’ébriété (au champagne, s’il vous plaît), et de ce qu’il apporte de rassurant et confortable à notre écrivain préféré (enfin, pas le mien, c’est juste une formule).

    Donc Amélie boit et elle aime ça, mais pas seule, parce que ce n’est pas pareil de boire seule. Du coup, elle se cherche un convigne, néologisme pour compagnon de beuverie. Il faut croire que cela ne se trouve pas sous le sabot d’un cheval (en même temps qui a trouvé quoi que ce soit sous le sabot d’un cheval ?) et on en reste là. Puis au hasard d’une signature dans une librairie, Amélie rencontre Pétronille, venue comme tout le monde (sauf moi) chercher une dédicace. Il se trouve que Pétronille a déjà écrit à Amélie, et Amélie lui a répondu. C’est mignon, une histoire de correspondante comme au collège. Sauf que Pétronille est un peu spéciale, au point qu’elle devient pour un soir, et puis d’autres la convigne d’Amélie (vous avez suivi pour l’histoire des convignes ?)

    Bref, on fait connaissance avec une « prolo » étudiante douée et cultivée, pleine de Shakespeare, de Marlowe, de Montherlant, mais aussi un peu frappée. En même temps là aussi, quel personnage d’Amélie n’est pas un peu frappé ?

    Bon, en fait tout ça c’est juste un prétexte à pondre cent-soixante pages environ, pour rater, comme d’habitude, la chute, car en fait il n’y a pas d’histoire structurée, il n’y a pas non plus de non-histoire, il n’y a rien.

    J’arrive à lire six-cent pages de certains auteurs qui ne racontent rien que le vent dans les arbres, leur cerveau fêlé ou leurs pieds qui bruissent sur l’herbe, et je trouve cela beau et indispensable.

    Par contre cent-cinquante pages d’Amélie et je suis estomaquée que tant de « rien » prenne autant de place dans nos librairies et bibliothèques, et à la télé et dans les journaux.

    Tout est dans le costume. Elle se déguise en Amélie, l’écrivain frappée, et cela suffit. Coucou, l’habit fait le moine !

    Pour en revenir à Pétronille, je n’ai pas aimé la fin, car c’est une putain de pirouette à la Marc Levy (Marc, si tu nous lis…) qui tombe A PLAT BORDEL DE NOM DE SA MERE !

    A un moment, Amélie Nothomb s’amuse à citer dans son roman Montherlant et Les Jeunes Filles, à propos d’un des romans de Pétronille (car oui, Pétronille va devenir écrivain au fait) et du rapport entre les lectrices et les auteurs (si tu n’as pas lu Les Jeunes Filles, de Montherlant, fonce !). Il y a une mise en abîme évidente, puisque Pétronille est d’abord lectrice d’Amélie. C’est dommage qu’elle n’aille pas plus profond dans cette idée. Je comprends le danger qu’il y a à écrire, le danger vital, physique : c’est là qu’Amélie commet pour moi la faute impardonnable. Elle se contente d’effleurer cette idée, alors qu’elle se veut au cœur de son ouvrage (je suppose ?). Difficile d’en dire plus sans dévoiler la (lamentable) fin, mais il y a là matière à tellement mieux. Pourquoi se contente-t-elle de si peu ?

    Écrire est dangereux à bien des égards, oui Amélie. Par contre, te lire est juste un peu chiant, guère dangereux.

    Sinon pour finir, mention spécial à la flopée de clichés que l’auteur nous sert sur le prolétariat. Amélie met en opposition culture et pauvreté, intelligence et pauvreté, curiosité et pauvreté, finesse et pauvreté. La famille de Pétronille est composé d’un couple de communistes, avec le père un peu beauf, pas méchant mais inculte et légèrement concon, la mère fatiguée et soumise. Il y a des passages proprement insultants sur ce qu’elle croit être la classe ouvrière. Je suggèrerai à Amélie Nothomb de fignoler un peu ses recherches sur le terrain la prochaine fois qu’elle se pique de sociologie, histoire de constater que tous les ouvriers français ne sont pas des communistes qui s’accrochent à la Corée du Nord et à Cuba.

     

    Quelques extraits, pour faire bonne mesure (sinon, pas obligée de le lire, éventuellement empruntez-le, volez-le, mais franchement n’allez pas claquer 16 euros pour ça, faites plutôt un don à l’UNICEF ou qui vous voudrez.)

     

    « Il me sembla soudain entrevoir, à la fenêtre d’une habitation trop vite croisée, l’adolescence de Pétronille – la souffrance vraie d’une fillette aux goûts absurdement aristocratiques, acquise aux idéaux d’extrême gauche, mais heurtée par l’esthétique prolétarienne, ces bibelots d’une laideur sans complexe, ces lectures d’une bêtise choquante.  Je regardai à nouveau Pétronille. Elle était tellement mieux qu’une fille cultivée. Son air de mauvais garçon aux yeux de piment rouge, son petit corps nerveux et musculeux de prisonnier évadé – et cette curieuse douceur du visage qui l’apparentait à Christopher Marlowe. Comme celui-ci, elle aurait pu avoir pour devise : « Ce qui me nourrit me détruit. » La grande littérature, qui avait constitué l’essentiel de son alimentation, était aussi ce qui l’avait maintenue à l’écart des siens, creusant entre elle et eux un fossé d’autant plus infranchissable que son clan ne le comprenait pas.

    Ses parents l’aimaient et pourtant, ils avaient peur d’elle. Françoise, qui avait l’âme délicate, admirait les romans de sa fille et les comprenait parfois. Pierre n’y comprenait rien et ne voyait pas en quoi cette prose surclassait celle de son journal de bord. »

     

    « Ce que je ne supporte pas, dans les musées, est le train de sénateur que les gens se croient obligés d’adopter en leur sein. Pour ma part, je m’y déplace au pas gymnastique, embrassant du regard de vastes perspectives : qu’il s’agisse d’archéologie ou de peinture impressionniste, j’ai observé les avantages de cette méthode. Le premier est d’éviter l’atroce effet Guide Bleu : « Admirez la bonhomie du Cheik el-Beled : ne dirait-on pas qu’on l’a croisé hier au marché ? » ou : « Un litige oppose la Grèce et le Royaume-Uni au sujet de la frise du Parthénon. » Le deuxième est concomitant au premier : il rend impossibles les considérations de sortie de musée. Les Bouvard et Pécuchet modernes en ont la chique coupée. Le troisième avantage, et non le moindre en ce qui me concerne, est qu’il empêche le surgissement du terrible mal de dos muséal. »

     

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  • Tuer le Père - Amélie Nothomb

    J’ai reçu en début de semaine le dernier ouvrage de Amélie Nothomb, celle que j’ai parfois envie d’appeler la petite fiancée des libraires tellement elle vend...

    Soyons clair, elle n’est pas ma tasse de thé.

    Mais… Pourtant…

    Parlons d’abord de ce que je peux bien lui reprocher. Pas grand chose en fait, si ce n’est de légèrement bâcler ses romans. C’est mon avis (et je le partage…) mais j’ai tout un gout de trop peu quand je referme ses livres. Elle a le talent nécessaire pour allumer comme des braises, puis ça s’éteint brusquement. Comme si elle ne voulait pas aller au-delà d’un certains nombre de pages. La plupart du temps, c’est vraiment l’effet que ça me fait : Amélie stoppe parce qu’il faut stopper. Alors qu’elle ouvre par ailleurs de telles possibilités d’écriture, des caractères à explorer, des failles  chez ses personnages qu’elle ne creuse pas assez…

    Ce nouveau roman, Tuer le Père, est aussi court que frustrant. Frustrant parce que j’ai aimé le lire, j’ai aimé les personnages et la démarche décrite.

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    Joe  habite avec sa mère, une femme qui tient plus aux nombreux hommes qui passent dans son lit, qu’à son fils. Elle ne le comprend pas, ne se sent pas de liens avec lui. Joe est passionné de magie, et c’est bien la seule chose qui le tient debout. L’absence d’un père, l’indifférence de sa mère, l’incompréhension générale, il finira pas s’en débarrasser et accepter de quitter le domicile maternel sur demande de sa mère. En effet celle ci a un énième homme dans sa vie, lequel ne supporte pas Joe.  Elle propose donc à son fils de quitter la maison en échange d’une petite somme mensuelle.

    Du haut de ses 15 ans, Joe  va habiter à l’hôtel, et se servir de ses dons de magiciens pour gagner sa vie, de-ci delà. Un soir, il rencontre un homme, qui lui dit que des talents tels que les siens trouveront à s’épanouir avec le bon professeur, et lui parle de celui qui est le meilleur magicien de la ville et du monde.

    C’est comme ça que Joe atterrit chez  Norman et Christina. Une sorte de lien va se créer, une famille même. Norman et Christina vont s’occuper de Joe, comme d’un fils. Norman lui apprendra ses tours, fera de lui le meilleur manipulateur de cartes possible. Jusqu’à la première trahison de Joe.  Qui sera pardonné, car un père pardonne à son fils, lui dit Norman.

    Jusqu’à la deuxième trahison de Joe, qui sera aussi pardonné, car Norman aime Joe comme le fils qu’il s’est choisi.

    Et c’est là le nœud gordien de l’affaire. Qui est le père de Joe ? Norman ? Ou celui pour qui Joe le trahi depuis le début, comme il le lui expliquera ?

    Est-ce que Joe en infligeant à Norman de telles trahisons, en le tuant littéralement à travers ses actes, le reconnait comme père malgré ses dénégations ?

    Joe tue Norman à travers ses actes, aussi précisément qu’un enfant cherche à tuer son père. C’est ce que Norman pense, et c’est ce qui l’aide à pardonner et à continuer d’aimer Joe, malgré Joe lui-même. Pendant que l’enfant lui, explique que ses actes ne sont que la fidélité qu’il marque au vrai père qui l’a choisi. Et toute la confrontation est là, entre un père qui veut trouver la faille chez ce fils, et un fils qui choisi de reconnaître un autre homme pour père. Un homme qu’il n’aura vu que 2 fois dans toute sa vie, le temps de trahir Norman.

    Les 150 pages du romans sont denses, prenantes, et la petite heure que j’ai passé à le lire m’a laissé quand même sur ma faim. J’aurais aimé que Nothomb creuse un peu plus du côté de la confrontation Norman-Joe après la révélation de la trahison originelle.

    En somme, j’aurais envie de le conseiller, parce que je l’ai lu d’une traite et que j’ai adoré le sujet, mais je trouve le traitement incomplet…

    A lire quand même.