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Bavardages

  • Presque rien

    J’avais commencé il y a un long, long, long moment de cela un texte sur Regards, de William H.Gass. Et au fur et à mesure de l’écriture, le livre s’y prêtant, je me suis plongée dans diverses photographies, et je n’en suis quasiment plus sortie. C’était comme une noyade volontaire dans l’image : les mots ne me convenaient plus. Ni à écrire, ni à lire, ni à dire. C’est une drôle de sensation que d’être là, pleine de mots, de pensées, de sentiments, mais avec un dégoût profond pour l’idée même de les faire vivre, de quelque manière que ce soit.

    C’est mystérieux l’envie, plus mystérieux encore sa disparition.

    Après avoir fermé le livre de Gass j’ai donc plongé pendant des jours dans un océan de photos, car c’est uniquement ce qui me convenait. J’avais l’impression d’embarquer sur cette coquille de noix photographiée par P.H Emerson : l’ancien ordre et le nouveau. Je ne sais vraiment pas ce qui s’est passé à ce moment là, mais il était clair que je n’avais plus envie de parler, à personne (un peu à mon fils tout de même, mais est-ce une autre personne ? (je n’entre pas dans ce débat, je divague assez comme ça)), plus envie d’écrire un mot, même un mail, un sms, plus rien à dire. Comme si, métaphore malheureuse, une source s’était tarie. Mais à bien y réfléchir il ne s’agissait pas de ça. Quand ça bouillonne encore à l’intérieur c’est qu’il y a de la vie, non ?

    Le plus difficile, c’est de l’expliquer autour de soi : déjà pourquoi avoir à l’expliquer ? Mais bon, socialisation blablabla, j’essaie de ne pas passer pour une timbrée. Mais comment dire avec des mots qu’on ne veut plus dire de mots, ni en écrire, ni en subir ? C’est toujours louche les gens qui se retirent du monde (déjà que je suis passablement « bizarre » c’est une difficulté supplémentaire). Le silence et le refus du bruit extérieur sont en soi un combat pour lequel on part désarmé : dans notre époque d’hyper communication il faut tout expliquer, presque tout justifier et commenter, alors que parfois il n’ya seulement rien à dire que « rien ».

    Enfin, rien, disons plutôt tout mais ailleurs, mais autrement. Mon tout s’est retrouvé dans l’image, dans le détail d’une photo ou d’une peinture observée en silence. Fabuleux plaisir égoïste de laisser passer les jours rien que pour soi. Je n’ai rien aimé tant que regarder les fenêtres pluvieuses par les yeux de Sudek ou imaginer les rues de Paris du temps d’Eugène Atget.

    Ça m’a bien plu de vivre comme ça, quelques mois, presque à l’économie : économie des mots, économie de l’expression. Il y a quelque chose dans cette retenue qui m’a profondément modifiée. La recherche de la précision dans les mots que l’on se donne les uns aux autres, l’exactitude des sentiments et de leur expression, me sont devenus essentiels (l’ont toujours été (mais qui respecte vraiment toujours sa nature ? (pas moi.))

    Maintenant que les mots se réveillent il me manque quelque chose, ou plutôt quelqu’un. Quelqu’un à qui écrire, quelqu’un pour qui écrire aurait un sens. On n’écrit plus voyez-vous. Ne me parlez pas de sms, ni même de mails. Je vous parle du stylo sur le papier, de l’enveloppe qu’on déchire, des pleins et des déliés, des taches d’encre, des ratures, des hésitations, toutes choses qui rendent la correspondance encore plus précieuse et unique.

    Bref, je suis venue me plaindre.

    C’est bien d’avoir un endroit où se plaindre.

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  • Mardi

    J’avais commencé un billet sur mes lectures du mois passé, histoire de faire un point avec moi-même (avec le temps je perds la mémoire, alors j’écris de plus en plus (certains diraient que je n’ai jamais eu vraiment de mémoire, je scotomise à l’envie que voulez-vous)) et je n’y arrivais pas. Parasitées par l’actualité politique, mes pensées étaient, et sont toujours, difficiles à mettre en ordre.

    Pourquoi lisons-nous, tous ? Parce que c’est distrayant souvent, beau parfois, irrémédiablement vital toujours. De rares fois une lecture peut bouleverser et apporter dans une vie, en plus du beau, du bon et du vrai, la foi en l’humanité, la confiance, l’espoir.

    La semaine qui a commencé est particulière, vous ne trouvez pas ? Il y a quelque chose qui semble nous dire cesse de croire qu’un changement est possible, le serpent est sournois qui vient parler aux cœurs faibles. Cette semaine me fait peur, elle est le chemin vers dimanche, où rien ne pourra changer si ce n’est en faveur du pire. Malgré les livres, les milliers de pages et ce que les millions de mots écrits ont semé sur Terre, il est probable que rien ne change jamais que pour le pire.

    Vivement lundi prochain.

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  • Info en passant

    Je rencontre quelques petits soucis d'internet, depuis quelques jours. En gros, je n'ai accès à internet que depuis mon téléphone, donc pas idéal pour bloguer ou aller sur les blogs amis. ça ne devait pas durer si longtemps, mais un peu quand même...

    Bref, je traine sur Twitter et Instagram, mais pas de blogging tant que je n'ai pas un ordi fonctionnel. Rien que cette petite note me gave à écrire...

    Alors à lundi, ou mardi, ou mercredi... On verra ! (Hâte de vous relire ceci dit !)

     

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  • Recette pour une journée sans banana bread

    C’est toujours intéressant de parler de soi, non ? Peu importe, considérez que je parle à voix haute. Le problème c’est que je pense trop, à des tas de choses inutiles, superflues, envahissantes, et inutiles surtout.

    Autant les partager (tant pis pour vous, pauvres lecteurs perdus par ici).

    Je n’ai jamais fait de banana bread. Je n’ai jamais de bananes assez mûres. Les fruits sont toujours mangés très vite chez moi.

    Je pense souvent à Leonard Cohen en ce moment, à cause de sa chanson Who By Fire. Elle m’obsède un peu, genre depuis six mois, et là ça commence à faire long, je ne sais pas si je dois en parler à quelqu’un en particulier.

    Je n’ai jamais mangé de banana bread. Pas encore eu l’occasion, et jamais croisé de boulangeries qui en vendent. En même temps je n’aime pas la banane cuite. Ceci explique cela ? Un évitement consciencieusement inconscient ?

    J’ai trop de lubies à gérer en ce moment. C’est comme des petits parasites qui viennent, heu parasiter ? mes journées. Quoique j’exagère, je les gère tellement mieux qu’avant.

    Exemple de lubies ? Tu ne veux pas vraiment savoir, mais moi je ne t’épargne pas. Je cultive mes obsessions, jalousement, comme autant de tares à laquelle je tiens précieusement.

    J’ai la lubie des livres qui contiennent le mot Leviathan, alors je les lis tous, du moins j’essaie. Depuis le Leviathan de la Bible, au Leviathan de Paul Auster, en passant Par Thomas Hobbes ou Julien Green. Mon monde s’éclaire quand j’en découvre un nouveau à lire.

    Je suis obsédée par les livres dont le titre contient American quelque chose. Même punition : je cours après les American Psycho, les American Pastoral, American Darling, American Rhapsody, et tous ceux qu’il me reste encore à lire.

    Je devrais peut-être acheter des bananes, les laisser mûrir et faire ce fichu banana bread histoire d’évacuer le problème une fois pour toutes.

    Je pense souvent à certaines actrices, elles ne sont pas mortes, si ce n’est pour le cinéma contemporain, qui les ignore complètement. Je pense souvent à Gabriel Anwar et à son parfait pas de danse avec Al Pacino dans Le Temps d’un Week-end. Je pense aussi souvent à Phoebe Cates, et aussi à Geneviève Bujold et Ali McGraw.

    Tiens, elles sont toutes brunes. N’y voyez rien de définitif.

    Je pense souvent que les paroles de Who By Fire sont exactement ce que je voudrais entendre en ce moment même, alors je l’écoute (merveille de l’internet, tu consommes instantanément tes désirs) (notez que je n’ai pas cédé au désir (brûlant) de faire un jeu de mots à base de désirs qui se consument dans le consumérisme (trop attendu) (mais tentant))))

    Je crois que je relie cette envie de banana bread à quelqu’un qui en fait souvent et que j’aime bien, de loin. Je crois que je voudrais qu’elle me dise, viens, j’ai fait un banana bread, viens à la maison en goûter un morceau avec moi. (Je crois que je mets trop de sentimentalisme dans ce banana bread, je serais forcément déçue (c’est une sorte d’ostie, une communion avec quelqu’un que je ne mérite peut-être pas (il faut dire que je suis loin d’être l’amie idéale) (distante, timide, recluse dans un monde imaginaire))))

    La dernière fois que j’ai ressenti l’assaut d’une lubie, c’était avec la couleur jaune. Il me fallait tout en jaune (une robe, un sac, un livre (n’importe quel livre avec une couverture jaune soleil suffisait à mon bonheur (pas reluisant pour une lectrice exigeante (ouais non, exigeante oui et non, je suis à géométrie variable, question exigence) une paire de chaussures, une broche, n’importe quoi de jaune m’emplissait de joie (je crois sincèrement que la couleur de la joie est le jaune)))))

    Quand j’aime une chanson je peux l’écouter cent fois d’affilée : ce n’est pas une figure de style, je l’écoute cent, deux-cent fois, jusqu’à en gaver chacune de mes cellules, et même alors je ne m’en lasse pas, et il ne me reste plus qu’à pleurer d’incompréhension (parce que je ne comprends pas ce qui se passe, je suis juste effarée par ma propre obsession et par ce qu’elle peut cacher ou révéler (rien ? allez savoir))

    Avez-vous parfois des révélations sur vous-même ? J’aime bien ce mot, révélation (tiens, cherchons voir s’il n’y a pas quelques dizaines de bouquins à lire contenant le mot Révélation) (nous voilà à nouveau au bord du gouffre du n’importe quoi) (enfin, nous, moi surtout, et évidemment je ne reculerai pas (je vous tiens au courant de la liste des livres « Révélation », si vous insistez)

    Pardon mais j’en reviens à ce banana bread : comment m’en débarrasser ? Dois-je filer chez Starbuck en acheter un, l’engloutir et constater le goût amer de la déception ? Parce que forcément ce sera décevant, ce ne sera pas LE banana bread, ce plat qui mérite un cérémonial ne saurait être assimilé à ce truc vendu par une multinationale qui deal du sucre sous forme de café. Ça ne se peut.

    Je me rends compte que la banane est un fruit jaune, comme le bonheur.

     

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  • Fin de partie

    Wow, ça faisait un moment que je n’étais passée par ici… Plein de bonnes raisons, notamment ma santé, qui a joué aux montagnes russes tout l’été.

    Oui je n’allais pas bien, rien de très grave en réalité (quoique le terme emphysème fasse un peu peur.)

    C’était un été surréaliste, durant le quel j’ai passé de bonnes vacances entre deux moments où je pensais y laisser si ce n’est ma peau, du moins mes poumons. Un été où l’on m’a demandé d’arrêter de fumer pour aller mieux, sauf que je ne fume pas docteur, ni ne côtoie de fumeurs… Un été où j’ai parfois eu le dynamisme de Jeanne Calment en fin de vie, avant de retrouver moitié moins de tonus qu’un élastique tout neuf.

    Bref, j’ai trainé ma carcasse, perdu du temps à faire les choses si lentement, si doucement, pur ne pas m’essouffler.

    J’ai un peu trainé sur Twitter, Instagram (ça va, il y a plus fatigant.)

    J’ai un peu lu mais pas tant que ça : c’est bizarre d’être essoufflée, et donc épuisée, même assise, même allongée, tant et si bien que lire est impossible.

    J’ai l’impression de me plaindre, alors que non, ça va tellement mieux (merci le pneumologue en or).

    J’ai hésité à revenir écrire ici, en me disant que personne ne m’y attendais, mais le fait est que moi, je m’attends ici depuis un moment, alors je me souhaite bon retour.

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