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Oh Océane - Page 9

  • Americanah - Chimamanda Ngozi Adichie

    L’observation des autres est souvent plus efficace que l’observation de soi-même : en tout cas en ce qui me concerne. J’adore regarder les autres, les passants inconnus autant que mes amis ou relations. Je regarde et j’imagine, j’extrapole, je déduis et parfois je comprends beaucoup de choses : sur moi-même. Lire, c’est un peu comme observer un autre de papier, non ?

    L’an dernier j’ai lu Americanah de Chimamanda Ngozi Adichie, j’ai observé son héroïne Ifemulu, et j’ai compris quelques petites choses sur moi. Miracle de mon nombrilisme.

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    Ifemulu est une jeune nigériane qui part étudier aux Etats-Unis. Arrivée là-bas, elle se découvre noire, par le regard des autres et par la situation des Noirs Américains. De jeune fille de bonne famille, étudiante, ambitieuse, intelligente, elle devient « noire », comme un particularisme qui servirait à la définir tout entière. C’est cette redécouverte de sa race dans les yeux des autres qui est au centre du roman. Ifemulu ouvre un blog, pour partager ses observations de la vie américaine, du racisme, et des relations sociales. Comme un pied de nez à la vie, ce blog fera sa réputation et la conduira à tenir des conférences sur ces thèmes. Le lecteur, lui, observera la vie amoureuse et professionnelle d’Ifemulu évoluer, et se heurter aux préjugés raciaux, aux difficultés qu’engendre le fait d’être noir aux États-Unis. De la plus simple, à la plus grave. Ainsi, le livre s’ouvre dans un premier chapitre sur une scène dans un salon de coiffure pour cheveux afro, « dans cette partie de la ville pleine de graffitis, de bâtiments insalubres, sans un seul Blanc à l’horizon, ».  Car c’est là qu’on exile l’africanité, et si une intellectuelle noire habitant à Princeton souhaite se faire tresser les cheveux, elle doit suivre le ban.

    Être noir à Lagos et à Princeton c’est différent. Cette différence se chiffre par le nombre de rejets, d’exclusions, de sourires entendus, et de réflexions paternalistes quand elles ne sont pas ouvertement racistes.

    Pour autant, pas d’atermoiements dans le roman de Chimamanda Ngozi Adichie, pas de sanglots, juste une fine observation factuelle, un recensement de la réalité de la peau noire, la liste des conséquences sur chaque instant de la vie, même le plus intime.

    Cette observation dont Ifemulu est le point central, m’a forcément ramenée à moi, et à ma vie en France. À cette chose que peu de gens comprennent s’ils ne la vivent pas dans leur chair : le regard de l’autre qui fait de vous un étranger quoi qu’il arrive. J’ai souvent du mal à expliquer cela : je n’ai jamais vraiment souffert d’un racisme violent, au sens où je n’ai pas subit de « sale arabe », ou de « rentre chez toi » mais j’ai toujours eu droit à des remarques paternalistes, ou réductrices, dès lors que j’indiquais mon prénom. Des phrases comme « ça n’a pas été trop dur pour toi de poursuivre tes études ? » (Trop dur pourquoi ? parce que je suis censée venir d’une famille où on empêche les femmes d’étudier et où on les voile de force ? parce que génétiquement je serais vouée à l’illettrisme ?) Des phrases comme « Et tu rentres chez toi souvent ? » Quand je réponds oui, c’est à trois stations de métro, je comprends bien que mon interlocuteur situe mon « vrai » chez moi au-delà de la méditerranée et non sur la ligne du métro parisien.

    Le racisme n’est pas forcément un coup de poing dans la face, il peut être un mot anodin, une question toute simple mais qui en dit long sur ce que l’Autre juge que l’on doit être : un éternel étranger, illégitime à vie.

    La lecture de Americanah m’a renvoyé à ma propre situation et à la façon dont je la gérais. Une des raisons pour laquelle ce livre m’a bouleversée.

    L’histoire d’Obinze, ancien amoureux d’Ifemulu, qui lui est arrivé à Londres, dans des conditions bien plus difficiles, est aussi passionnante à suivre. Les deux trajectoires des anciens amants finiront par se croiser à nouveau, chacun arrivant avec ses bagages et ses choix. L’histoire d’Ifemilu est aussi une belle observation d’un féministe quotidien, réel et vécu en prise avec un patriarcat aux habits multiples.

    Je vous reparle de ce livre lu l’an dernier, parce que je l’avais beaucoup aimé à l’époque, que je n’avais pas eu le temps de le chroniquer, mais qu’il n’a guère quitté mon esprit. Et le fait est qu’il sort en poche ces jours-ci, alors n’hésitez pas à vous l’offrir ! Pour ma part, je l’avais emprunté à la bibli dès la sortie, et j’attendais le format poche avec hâte pour l’avoir chez moi (appartement parisien oblige, je privilégie toujours les formats poche..)

    Bref, si vous ne l’avez pas encore lu, je vous y engage. Quelle que soit votre situation, vous y trouverez matière à réflexion.

    Extraits:

     « Ifemelu avait grandi dans l’ombre des cheveux de sa mère. Ils étaient noir-noir, si abondants qu’ils absorbaient deux flacons de démêlant quand on la coiffait, si épais qu’il leur fallait rester des heures entières sous le casque du séchoir, et quand enfin libérés des bigoudis de plastique rose ils s’échappaient en une masse libre et volumineuse, ils se répandaient jusqu’en bas de son dos comme une fête. Son père les appelait sa couronne de gloire. « Est-ce que ce sont de vrais cheveux ? » demandaient des inconnus qui tendaient la main pour les toucher avec respect. D’autres disaient : « Êtes-vous de la Jamaïque ? » comme si seul un sang étranger pouvait expliquer une chevelure aussi opulente qui ne s’éclaircissait pas aux tempes. Enfant, Ifemelu se regardait souvent dans la glace et tirait sur ses cheveux, les déroulait, souhaitant désespérément qu’ils deviennent semblables à ceux de sa mère, mais ils demeuraient rêches et poussaient difficilement ; les coiffeuses disaient qu’ils étaient coupants comme des couteaux. »

    « Si vous dites que la race n’a jamais été un problème, c’est uniquement parce que vous souhaitez qu’il n’y ait pas de problème. Moi-même je ne me sentais pas noire, je ne suis devenue noire qu’en arrivant en Amérique. Quand vous êtes noire en Amérique et que vous tombez amoureuse d’un Blanc, la race ne compte pas tant que vous êtes seuls car il s’agit seulement de vous et de celui que vous aimez. Mais dès l’instant où vous mettez le pied dehors, la race compte. Seulement nous n’en parlons pas. Nous ne mentionnons même pas devant nos partenaires blancs les petites choses qui nous choquent et ce que nous voudrions qu’ils comprennent mieux, parce que nous craignons qu’ils jugent notre réaction exagérée ou nous trouvent trop sensibles. Et nous ne voulons pas les entendre dire : Regarde le chemin que nous avons parcouru, il y a seulement quarante ans nous n’aurions pu former un couple légal, bla-bla-bla, parce que savez-vous ce que nous pensons quand ils disent ça ? Nous pensons mais putain pourquoi cela aurait-il dû être illégal de toute façon ? Mais nous nous taisons. Nous laissons tout ça s’accumuler dans nos têtes et, quand nous assistons à de sympathiques dîners progressistes comme celui-ci, nous disons que la race n’est pas un problème parce que c’est ce que nous sommes censés dire, pour que nos sympathiques amis progressistes ne soient pas perturbés. C’est la vérité, je parle d’expérience. »

  • Les gens qui doutent

    Je porte le doute en moi comme personne. Ou comme n’importe qui peut-être. Je doute presque en permanence, de tout, de moi, des autres. Celui-là qui dit m’aimer, est-ce réel ou un mensonge dont il n’a pas encore conscience ? Ce compliment qu’on me fait, est-il sincère ou de pure forme ? Et mes capacités, mes talents, mes compétences : est-ce que tout cela existe réellement, ou ne suis-je bonne à rien, juste parfois habile à bénéficier du hasard.

    J’aime les gens qui doutent, comme dit la chanson, cette fragilité les rend précieux à mes yeux : elle est le signe de quelque chose de doux en eux, d’aimable et de bienveillant.

    Je déteste le doute qui m’envahit et prend presque le contrôle de ma vie. Douter, c’est se poser mille questions avant même d’agir, c’est se remettre perpétuellement en question, en cause même, et ne jamais oser pousser de porte.

    Je ne sais pas pourquoi je doute en permanence, alors que dans le fond je m’adore, je m’aime énormément, et je crois savoir ce que je vaux. Mais paradoxalement, je vis comme si cette certitude ne valait que pour moi, et que pour ce qui est de ma place dans le monde, c’était une autre paire de manches.

    Tout cela n’est pas bien grave, si ce n’est que c’est épuisant de douter. Qu’on s’oblige à plus de circonvolutions pour atteindre les buts les plus simples, souvent pour échouer. Enfin, « on » non… « Je » serait le terme plus honnête. Je me pose trop de questions tout le temps sur tout, et c’est épuisant. C’est une curieuse torture que je m’inflige, alors que je pourrais m’en passer. « Pourquoi ne m’a-t-elle pas invitée à sa soirée, alors que c’est mon amie ? Parce que ce n’est pas ton amie en réalité. Mais alors pourquoi l’affirme-t-elle ? » Etc.

    Parfois, j’aimerais juste arrêter de penser, et agir sans jauger les mille interprétations possibles à un acte. Ou accepter un compliment, une remarque, même négative, un mot, sans y engouffrer toute la douleur du monde. J’aimerai sortir de ma zone de confort sans ressentir la peur, les tremblements, le souffle coupé, alors que tout pourrait bien se passer.

    Je cherche un mode d’emploi à la vie depuis l’enfance. À force de chercher le mode d’emploi, on oublie de vivre.

    Enfin, « On ».

  • Pieter Aspe - Le Carré de la Vengeance

    J’ai mis cap vers les Flandres la semaine passée, vraiment par hasard pas mal de mes activités  m’ont portée vers ces terres si particulières. Demain je vous parlerai d’une promenade lilloise qui m’a beaucoup plus. Aujourd’hui il sera question de livre, avec Pieter Aspe et les aventures de son héros, le commissaire Van In. Dans le cadre du Mois Belge de Anne et Mina, il y a une journée consacrée au polar. Et tout les prétextes sont bons pour parler d’un bon bouquin !

    J’ai cherché un auteur de polar belge que je en connaissais pas, histoire de ne pas retomber dans ma facilité, à savoir (re)lire du Simenon par exemple. J’ai jeté mon dévolu sur Pieter Aspe, et comme je suis légèrement psychopathe, je ne pouvais commencer que par le premier volume des enquêtes du commissaire Van In, et non par n’importe quel opus. Du coup, il m’a fallu le temps de mettre la main dessus (une commande après de mon adorable libraire).

    Or donc, me voilà avec Le Carré de la Vengeance entre les mains, et moins de trois heures plus tard, j’avais englouti cette première enquête. Bah voilà, un héros bien dessiné avec une personnalité comme on aime, une histoire de cambriolage bien ficelée, un brin de sociologie avec des rapports de classe bien observé, la ville de Bruges en fond et un humour décapant, que demander de plus ? Autant vous dire que j’attaque fissa la suite des enquêtes du commissaire Van In ! Toutes ces pages m’ont donné envie d’une bonne pinte de Duvel et d’un autre séjour à Bruges ^^

    L’auteur écrit en flamand, je ne sais pas ce que penserait un néerlandophone à la fois francophone, de la traduction, mais j’ai bien aimé le style et l’écriture laissait vraiment transparaitre une ambiance toute particulière, un effet important quand on lit un polar… Par ailleurs, les romans de Pieter Aspe ont fait l’objet d’une adaptation pour la télévision. J’avoue que je suis tentée de voir cette série, mais quand j’aurais lu toute la série des Van In. Histoire de n’être pas « hackée » par l’imagination du réalisateur, priorité à ma propre imagination :)

     

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    Le Carré de la Vengeance – Pieter Aspe

    Dispo au Livre de Poche

  • Mythe Loaf

    Retour de mes petites listes de fin de semaine, résultats de mes flâneries online et irl, avec au passage un jeu de mot bien pourri en titre :)

    Jack London est un de mes auteurs favoris, aimé, admiré, un auteur à part que j’aime autant pour sa plume que pour ses positions politiques.

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    Un mythe parmi les mythes. Au cœur de ses ouvrages, le Talon de Fer est un de ceux qui m’a le plus touchée, que j’ai offert, partagé, encouragé à lire, tant ce qu’il écrit trouve encore un écho aujourd’hui. La plupart de ses romans, récits et nouvelles ont été publiés aux merveilleuses éditions Phébus, qui fait un très beau travail autour de Jack London. Mais en me promenant sur le site de Claude Guillon, j’ai vu que les éditions Libertalia souhaite rééditer ce fameux Talon de Fer, livre ô combien politique, dans une nouvelle traduction, revue, dépoussiérée et qui redonne un peu de lumière à l’aspect politique de l’œuvre de London. Cette retraduction a un coût, surtout pour une maison indépendante comme Libertalia, et celle-ci nous invite donc à participer, au travers d’une souscription, au financement de la réédition du Talon de Fer. Si comme moi vous êtes sensible à l’œuvre de Jack London, n’hésitez pas à faire un tour sur ce site.

    Tanis Chandler est un mythe vivant, une légende comme il ne peut en naître qu’à Nantes. Car oui, Tanis Chandler est nantaise, autant qu’elle fut une (éphémère) étoile d’Hollywood. J’aime ce type d’information, qui me persuade chaque jour que Nantes est définitivement le centre du monde, ainsi que l’affirmait André Breton… Je regarde cette photo de la belle Tanis Chandler, j’imagine son périple, de la rue du Calvaire à Hollywood, et je regarde la liste de ses films en me demandant, avec les lecteurs de Presse Océan, ce qu’a été la vie de cette femme après la gloire hollywoodienne. Bref, un joli conte dont la conclusion est encore à écrire.

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    Van Gogh est un autre mythe, un de ceux qui stimule la création de ses admirateurs. Et à quel point ! Un long métrage sur sa vie est prévu pour fin 2016. Quoi d’extraordinaire me direz-vous, des films sur Van Gogh, ce n’est pas ce qui manque. Certes. Mais ce futur film sera réalisé à partir de ses propres peintures. L’idée folle est de se servir de l’œuvre même de Van Gogh comme support à ce film, d’une manière totalement inédite, comme le montre le trailer :

    J’ai particulièrement hâte de voir le film entier.

    Avant d’être un mythe et d’accéder à la gloire ou la reconnaissance, il faut, parait-il, trouver sa vocation, ce truc mystérieux qui nous fait soulever des montagnes, parfois jusqu’à éblouir le monde. Je ne sais pas pour vous, mais moi cette idée de la vocation m’a toujours gênée. J’admire les gens qui peuvent en ressentir une, nourrir une passion et donner toute leur énergie dans cette seule direction. Pour ma part, j’aime un peu tout et n’importe quoi, dans le désordre et sans réelle échelle de préférence. Enfin, pour être plus précise, ce n’est que très récemment que j’ai commencé à réfléchir à cette question : défricher mes multiples amours pour définir ce qui relevait vraiment de la vocation et de la passion. Autant vous dire que ce n’est pas simple quand on a une nature infidèle, ou éclectique, ou versatile diront les plus vilains. Bref, quand je suis tombée sur cette conférence TED de Emilie Wapnick (clic pour regarder), je me suis dis, enfin on parle de gens comme moi ! Si vous aussi vous ne savez pas choisir, si vous ne savez pas ce que vous voulez faire alors que vous êtes « grand », si le choix de votre profession s’est faite au hasard, ou pour faire plaisir, alors cette conférence est pour vous.

    Dans un autre genre, mais un mythe également, tant il a été retravaillé, de manière plus ou moins heureuse, Robinson Crusoé est de ces histoires qui inspirent : après tout la solitude est la porte ouverte à l’imagination. Cette fois-ci, c’est aux enfants, petits et grands, que s’adresse cette nouvelle interprétation du solitaire sur son île, puisque il s’agit du nouvel animé de Studio Canal. Plus je vieillis et plus j’aime les dessins animés, d’autant plus quand je peux partager ces moments avec mon fils. Dans cette nouvelle version, le mythe du naufragé est vu du point de vue d’un perroquet, qui vit sur l’ile déserte avec ses amis animaux, et qui a pour particularité de croire qu’il existe quelque part un monde en dehors de son île. Aussi, quand Robinson fait naufrage sur cette île, tous les animaux sont en effervescence et  méfiant, alors que mardi, le perroquet y voit l’occasion de découvrir l’inconnu, de rompre la monotonie de son existence. La rencontre entre l’homme et les animaux sera ponctuée de haut et bas, avec autant de larmes que de rires. Et c’est peut-être ce qui est le plus attachant dans ce film : des portraits tout en nuances, permettant ainsi divers degré de lecture suivant notre âge. Mon fils a beaucoup aimé, parce que cela lui semblait réaliste ; en effet tout ne se passe pas forcément bien, et les « méchants » peuvent (presque) gagner, si l’on n’y prend garde. L’aspect 3D ne m’intéresse pas, mais uniquement parce que je ne la vois pas (hé oui !), par contre mon fils a trouvé que cela rajoutait de l’intensité au film. En fait il a plutôt dit « ça fait encore plus vrai », mais ça revient au même ^^ Bref, si vous voulez passer un chouette moment seul ou avec enfants, et pourquoi pas après discuter des fausses apparences, des relations de confiance, de la naissance de l’amitié ou simplement rire, vous aurez avec Robin Crusoé un support parfait ce weekend.

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    Enfin, impossible de finir ce billet sans parler de la mort d’un autre mythe, l’inégalable Prince Rogers Nelson. Depuis la mort de Michael Jackson en 2009, j’ai l’impression que la vie se fait fort de m’arracher les idoles de mon enfance une par une. J’ai la tête encore pleine de ses clips d’une sensualité folle, la même que dégageait sa musique. Encore un artiste qui va nous manquer. Je vous laisse avec le fabuleux Purple Rain, et vous souhaite un joli weekend.

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  • Amedeo de Souza Cardoso Au Grand Palais

    La petite chanceuse que je suis continue de découvrir de belles choses : car quelle plus grande chance sur cette Terre que d’observer la beauté autour de soi ? Vous connaissez cette extase de découvrir un auteur, de se rendre compte combien on l’aime et combien de livres il nous reste à lire : tant de moments de bonheur anticipés. Cette sensation on peut la rencontrer dans tant de domaines artistiques.

    Hier soir, c’est un peintre que j’ai rencontré, à travers la nouvelle expo du Grand Palais. Un peintre totalement inconnu pour moi, et partant, une fabuleuse source de bonheur à venir. Cet artiste, c’est Amadeo de Souza-Cardoso, un peintre portugais mort au début du XXe siècle, et depuis à peu près tombé dans l’oubli. C’est dire si j’étais curieuse de connaître ce contemporain et ami de Modigliani, Brancusi ou Delaunay.

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    Étonnement de découvrir une œuvre nombreuse et variée ! Le Montparnasse de ces années là était vraiment un vivier de folie artistique et d’imagination. Ne cherchez pas à accoler une étiquette à l’œuvre de Amedeo de Souza-Cardoso, à l’instar de Picasso il a touché à tous les genres ou presque, de l’impressionnisme au futurisme en passant par le cubisme. Ce qui est épatant c’est d’y retrouver quand même une unité de style. Au sortir de l’exposition, je pouvais (presque) (et modestement) me dire je sais ce qu’est un tableau de Amedeo de Souza-Cardoso : une occasion supplémentaire d’observer mille détails de beauté.

    Tout au long de ma visite hier soir, j’ai ressenti à nouveau ce plaisir de la découverte, et plus encore cette joie de prendre le temps, de se tenir debout, face à une œuvre et de la détailler, comme on détaille le souvenir de son premier amour. Revenir observer une tache de couleur qui nous a échappé, comme on revient lire une phrase d’un livre pour mieux l’absorber.

    L’œuvre de Amedeo de Souza-Cardoso m’a aussi rappelé qu’il y avait un temps une Europe artistique qui venait prendre vie à Paris, une Europe qu’on voudrait plus concrète aujourd’hui, ou du moins plus portée vers l’amour du beau et partage, et moins vers l’édification de barbelés. Mais là je m’égare un peu (quoique...) Ses tableaux sont à l’image d’un creuset, tel un alchimiste qui aurait attrapé de-ci de-là autant d’éléments merveilleux pour en faire un tout autre trésor. L’œil qui observe n’est jamais lassé, car à chaque tableau il découvre un nouveau trait, une espièglerie dans la couleur, une référence dans une courbe étonnante. Rendons grâce au Grand Palais d’avoir à nouveau remis en lumière un artiste trop peu honoré : un critique américain disait de Amedeo de Souza que c’était un des secrets les mieux gardé de l’Art Moderne.  

    Cher lecteur qui passe par là, si tu veux pour une après-midi prendre un billet vers de nouveaux souvenirs, va voir Amedeo de Souza-Cardoso au Grand Palais. Et quoi de mieux que Paris au printemps :) ?

    Gros coup de cœur.

    Amedeo de Souza-Cardoso – Du 20 avril au 18 juillet 2016 – Grand Palais

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