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poésie - Page 7

  • L'amoureuse du dimanche

    C'est une journée particulière, qui la voit franchir le pas de la porte. Juste une date, un souvenir, un frisson revenu du passé.

    Une belle raison de se rappeler les belles choses : elles ne meurent jamais.


    Elle est debout sur mes paupières
    Et ses cheveux sont dans les miens,
    Elle a la forme de mes mains,
    Elle a la couleur de mes yeux,
    Elle s’engloutit dans mon ombre
    Comme une pierre sur le ciel.

    Elle a toujours les yeux ouverts
    Et ne me laisse pas dormir.
    Ses rêves en pleine lumière
    Font s’évaporer les soleils,
    Me font rire, pleurer et rire,
    Parler sans avoir rien à dire.

    Paul Eluard

  • Eau, tonne

    Hier on a vraiment senti le changement de saison, le froid, le vent, une petite pluie fine…. De quoi écourter la promenade et donner envie de se réfugier au chaud, avec un thé chaud et une petite laine.

    Hier j’ai retrouvé le plaisir de s’emmitoufler dans un gilet bien chaud, à grosses mailles, du genre de ceux que je ne saurais jamais tricoter moi-même.

    L’automne est là, les feuilles tombent (et se ramassent à la pelle) et un (autre) poète en parle si bien :

    Automne malade et adoré
    Tu mourras quand l’ouragan soufflera dans les roseraies
    Quand il aura neigé
    Dans les vergers

    Pauvre automne
    Meurs en blancheur et en richesse
    De neige et de fruits mûrs
    Au fond du ciel
    Des éperviers planent
    Sur les nixes nicettes aux cheveux verts et naines
    Qui n’ont jamais aimé

    Aux lisières lointaines
    Les cerfs ont bramé

    Et que j’aime ô saison que j’aime tes rumeurs
    Les fruits tombant sans qu’on les cueille
    Le vent et la forêt qui pleurent
    Toutes leurs larmes en automne feuille à feuille
    Les feuilles
    Qu’on foule
    Un train
    Qui roule
    La vie
    S’écoule

    Guillaume Apollinaire, Alcools, 1913

    Je vous laisse, et je retourne à mon dimanche, emmitouflée et contente :)

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  • Juin, il pleut...

    Un poème de circonstance, qui fait les yeux un peu mouillés, comme l'est ce ciel de juin. Je suis toujours surprise de voir comme parfois les saisons de la nature suivent un peu celles du coeur. S'il pleut au ciel, qu'il pleuve dans mon coeur ou dans le jardin, le résultat sera le même : à quand le soleil ?

    Juin - René-François SULLY PRUDHOMME

    Pendant avril et mai, qui sont les plus doux mois,
    Les couples, enchantés par l'éther frais et rose,
    Ont ressenti l'amour comme une apothéose ;
    Ils cherchent maintenant l'ombre et la paix des bois.

    Ils rêvent, étendus sans mouvement, sans voix ;
    Les coeurs désaltérés font ensemble une pause,
    Se rappelant l'aveu dont un lilas fut cause
    Et le bonheur tremblant qu'on ne sent pas deux fois.

    Lors le soleil riait sous une fine écharpe,
    Et, comme un papillon dans les fils d'une harpe,
    Dans ses rayons encore un peu de neige errait.

    Mais aujourd'hui ses feux tombent déjà torrides,
    Un orageux silence emplit le ciel sans rides,
    Et l'amour exaucé couve un premier regret.

     

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  • William S. - Sonnet CXLVII

    William, le grand William Shakespeare n’a pas écrit que des pièces au ressort dramatique puissant. Il a aussi produit une magnifique œuvre poétique. C’est un de ces sonnets que je vous propose aujourd’hui. Un sonnet sombre et affligé, comme parfois l’amour peut l’être. (Après tout, c’est bientôt la Saint-Valentin, dénotons un peu au milieu de tout ce rose ^^)

    Et puis, c’est pour moi l’occasion de remettre les pieds, ailés, dans le challenge de Maggie et Claudialucia.

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    Le Sonnet CXLVII n’est pas d’une gaieté folle, certes, mais la noirceur des vers vient au secours d’un cœur déchiré, passé l’amour il reste le soin de la raison…

    My love is as a fever longing still,
    For that which longer nurseth the disease;
    Feeding on that which doth preserve the ill,
    The uncertain sickly appetite to please.
    My reason, the physician to my love,
    Angry that his prescriptions are not kept,
    Hath left me, and I desperate now approve
    Desire is death, which physic did except.
    Past cure I am, now Reason is past care,
    And frantic-mad with evermore unrest;
    My thoughts and my discourse as madmen's are,
    At random from the truth vainly expressed;
    For I have sworn thee fair, and thought thee bright,
    Who art as black as hell, as dark as night.

    Mon amour est comme une fièvre toujours altérée de ce qui l’alimente incessamment : il se nourrit de ce qui perpétue sa souffrance pour satisfaire son appétit troublé et morbide.
    Ma raison, médecin de mon amour, fâchée de ce que ses prescriptions ne sont pas suivies, m’a abandonné, et moi, désormais désespéré, je reconnais que l’affection que combattait la science est mortelle.
    Ma raison étant impuissante, je suis désormais incurable, et je délire frénétiquement dans une incessante agitation. Mes pensées et mes paroles sont, comme celles des fous, de vaines et fausses divagations.
    Car j’ai juré que tu es blanche et cru que tu es radieuse, toi qui es noire comme l’enfer et ténébreuse comme la nuit.

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    Je vous souhaite un dimanche plus heureux tout de même :)