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Oh Océane - Page 68

  • Soleil intérieur

    L’autre matin j’ai croisé dans le métro un homme qui souriait. Il avait les yeux mi clos, et semblait sourire à son ange intérieur. C’était assez curieux de l’observer, peut-être le fait qu’il était assez beau, l’air gentil et doux, et ces yeux mi-clos qui cachaient quoi ? Un secret, un souvenir, peut-être rien, ou tout l’amour du monde, ou simplement la satisfaction de son petit déjeuner….

    Il n’y a pas un matin où je ne me raconte pas mille histoires sur mes voisins de métro. Des scénarios de trente secondes, juste entre deux rames, le temps de croiser un visage, vite vu, vite oublié, mais trente secondes suffisantes pour apercevoir un univers entiers de possibilités.

    Parfois (allez, souvent, avouons-le..), j’aimerais que les gens assis sur ses banquettes, ou debout la main sur la barre en métal, se parlent, se racontent des choses mi-secrètes mi fortuites, se content le roman lu la veille, l’amour malheureux, ou simplement le bonheur de ce petit café à l’aube dans le troquet en bas de chez soi.

    On ne se parle guère, on ne s’écrit plus, moi la première. Je fais trainer mes réponses aux mails, aux sms, aux MP,  si vous saviez… Certains savent… Je promets devant vous, Dieu (qui n’en a cure certainement), de m’amender et de m’améliorer. Ce n’est pas par dédain ou mépris, c’est juste que j’attend, pour trouver le moment, le meilleur, pour exprimer ce que j’ai à dire, et ce moment parfait, il n’existe pas… C’est comme les scénarios de trente secondes entre deux rames de métro : juste l’illusion d’un moment parfait.

    Alors je vais répondre à tout mes mails en souffrance, bien ou mal, et puis le matin dans le métro, il se peut que moi aussi j’esquisse un sourire, de satisfaction, de mystère, de bonheur, qui sait…

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  • L'amoureuse du dimanche

    C'est une journée particulière, qui la voit franchir le pas de la porte. Juste une date, un souvenir, un frisson revenu du passé.

    Une belle raison de se rappeler les belles choses : elles ne meurent jamais.


    Elle est debout sur mes paupières
    Et ses cheveux sont dans les miens,
    Elle a la forme de mes mains,
    Elle a la couleur de mes yeux,
    Elle s’engloutit dans mon ombre
    Comme une pierre sur le ciel.

    Elle a toujours les yeux ouverts
    Et ne me laisse pas dormir.
    Ses rêves en pleine lumière
    Font s’évaporer les soleils,
    Me font rire, pleurer et rire,
    Parler sans avoir rien à dire.

    Paul Eluard

  • Blog blues

    C’est une semaine sur les chapeaux de roues qui se termine.

    [Aparté] Si quelqu’un a déjà vu des roues avec des chapeaux, qu’il me prévienne illico. [Fin de l’aparté]

    Je me suis à peine rendu compte du jour férié. Le fait est que je suis soit réellement débordée, soit super mal organisée, soit trop impatiente pour faire les choses les unes après les autres.

    (C’est peut-être ça, le fond de la vérité…)

    Je me surprends à entamer les achats de Noël pour mon fils (ceci avec l’excuse toute trouvée qu’il vaut mieux étaler la douloureuse…) Mon esprit, lui, vogue vers des contrées imaginaires, toujours pour Noël. Pour tout dire je cherche une destination européenne, accessible par le train (absence de permis oblige…) pour y passer un week-end. J’hésite entre Francfort, Vienne, la Savoie…. Je réfléchis encore. L’automne n’est pas encore passé que je suis déjà en hiver…

    Il y a un autre sujet sur lequel je me penche régulièrement ces jours-ci : la cohérence du blog. A supposer qu’un blog doive avoir la moindre cohérence…

    Ici, je peux parler livres, parfois politique, chaussures, vernis, psycho de comptoir, famille, cinéma… Je suis multithématique comme on dit gentiment. Mais ce côté multi me fait souvent sentir « à côté ». Comme si je manquais d’une identité forte, d’un cercle de référence.

    Je ne suis ni un blog « Maman », ni « Mode », ni « Beauté », ni « Lifestyle » ni « Livres », et puis quand même si, je suis tout ça à la fois…

    J’espère ne pas heurter ou insulter les lecteurs qui me font l’honneur et le bonheur de venir régulièrement ici me lire, car sans eux je parlerais dans le vide galactique du web, mais parfois, rarement mais parfois quand même, je ressens comme une certaine solitude bloggosphérique Je n’appartient à aucune de ces communautés de copines bloggeuses, qui se reconnaissent entre elles C’est toujours un peu un pincement au cœur pour moi quand je lis via twitter, ou FB, ou ailleurs, les comptes-rendus de leur papotages, soirées, etc. Ce n’est pas grand-chose, voire futile, mais tout de même. Je sais que malgré moi j’instaure une certaine distance, un mur, pourtant je me trouve relativement gentille et polie, mais cela ne doit pas suffire.

    Bon, c’était le petit coup de blues du vendredi soir, il faut bien qu’il y en ait !

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    Photo via Pinterest


  • Antoine et Cléopâtre

    Aujourd’hui un peu de lecture, pour tout dire une lecture commune, dans le cadre du challenge Shakespeare, avec Claudialucia et Maggie.

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    Antoine et Cléopâtre, comme un miroir à Roméo et Juliette. Shakespeare nous offre encore une histoire de passion et de fureur. Mais là où la fureur n’était que dans l’entourage de nos amants de Vérone, elle habite complètement la relation des amoureux du bord du Nil.

    Antoine et Cléopâtre, c’est le tumulte, la jalousie, les disputes amoureuses, les colères et les réconciliations, jusqu’à l’ultime union dans la mort.

    A la mort de Jules César, l’empire romain est aux mains d’un triumvirat, qui compte notamment Octave et Antoine. Ce dernier découvre l’Egypte dans sa part de l’empire, et avec l’Egypte sa reine, Cléopâtre. De cette rencontre va naitre ce qu’on ne peut appeler autrement qu’une passion tumultueuse, au risque de tomber dans les clichés harlequinesque. Mais la vérité est là : on peut observer un couple d’amants qui n’a rien de pur comme pouvaient l’être Roméo et Juliette. Ce sont deux fortes personnalités, ambitieuses et passionnés, qui vont s’adorer et se détester tour à tour. Antoine tourne le dos à la loyauté et à la morale romaine pour sa Cléopâtre, avant de retourner à Rome satisfaire aux jeux de la politique, quitte à épouser une autre femme, la sœur d’Octave.

    C’est la stratégie politique de ce dernier, Octave, qui pousse nos amants au paroxysme de la démesure. Et c’est Octave qui tirera son épingle du jeu.  Les deux amants empêtrés dans leur relation tempétueuse ne pourront rien face à la détermination politique et guerrière de Octave. Antoine aura tout perdu, l’honneur, son rang, sa vie, et très vite Cléopâtre le  rejoint dans sa décision, pour mourir à son tour avant de subir l’humiliation de la défaite.

    Cette pièce est à lire, à relire, à découvrir, à aimer… C’est une pièce sur l’amour, mais aussi sur la stratégie politique. C’est une pièce qui donne à voir un monde ancien s’écrouler et laisser place à un autre, plus moderne, délesté d’une certaine morale, au profit de la stratégie du vainqueur. L’honneur, la fierté des deux amants maudits sont écrasé par une sorte de real politik de l’époque.

    Quelques extraits :

     « Cléopatre. — Je me sens malade et chagrine.

    Antoine. — Il m'attriste d'avoir à vous faire part de ma résolution...

    Cléopatre. — Emmenez-moi. Soutiens-moi, Charmion. Je vais tomber. Cela ne peut pas durer ainsi ; les forces de la nature n'y sauraient suffire.

    Antoine. — Reine adorée...

    Cléopatre. — Ecartez-vous de moi, je vous en prie.

    Antoine. — Qu'y a-t-il ?

    Cléopatre. — Je lis dans vos regards les bonnes nouvelles que vous avez reçues. Que dit votre légitime ?... Vous pouvez vous en aller. Plût aux dieux qu'elle ne vous eût jamais laissé venir ! Qu'elle n'aille surtout pas dire que c'est moi qui vous retiens ici. Je n'ai sur vous pas le moindre pouvoir. Vous êtes à elle.

    Antoine. — Les dieux savent que...

    Cléopatre. — Oh ! jamais reine fut-elle plus indignement trahie ? Mais dès les premiers jours j'ai vu la trahison se préparer.

    Antoine. — Cléopâtre...

    Cléopatre. — Comment le croire mien et fidèle, quand ses serments secoueraient les trônes des dieux, lui qui fut parjure à Fulvie ! Exécrable folie, de se laisser piper à ces serments du bout des lèvres, et qui se brisent d'eux-mêmes aussitôt prononcés.

    Antoine. — Très douce reine.

    Cléopatre. — Non, je vous en prie, ne cherchez pas à colorer votre départ ; disons-nous adieu et partez. Quand vous imploriez pour rester, alors c'était le temps des paroles : pas question de partir, alors. Nos lèvres et nos yeux ne parlaient que d'éternité ; la belle courbe de vos sourcils abritait la félicité ; tout en nous et jusqu'à la plus chétive parcelle était de la race des dieux ; et certes rien de tout cela n'a changé — si toi, le plus grand des guerriers, tu n'es pas devenu le plus grand des menteurs.

    Antoine. — Eh quoi ! Madame.

    Cléopatre. — Que n'ai-je ta carrure. Tu apprendrais qu'il y a un cœur en Egypte.

    Antoine. — O Reine, écoutez-moi. Une impérieuse nécessité requiert par ailleurs mes services — pour un temps ; mais tout mon cœur reste occupé de vous. Sur notre terre d'Italie étincellent les glaives de la guerre civile. Sextus Pompée va forcer les portes de Rome. La dualité trop égale du pouvoir intérieur a donné prétexte aux factions. Ceux que d'abord on détestait, à présent enrichis, ont acheté la faveur publique. Et, Pompée, le proscrit, fort de la réputation de son père, s'insinue dans les cœurs de ceux qui n'ont point su profiter du régime actuel ; le nombre de ceux-ci devient menaçant. Pourrie de loisir, l'impatiente oisiveté aspire à quelque changement plein de risques... Un motif plus particulier, qui près de vous pourra justifier mon départ, c'est la mort de Fulvie.  »

     

    « Cléopatre. — Donne-moi mon manteau. Pose la couronne. Je sens une soif immortelle. Jamais plus le jus de la grappe d'Egypte ne viendra rafraîchir mes lèvres. Fais vite, Iras ! Dépêche-toi, je crois entendre Antoine ; il m'appelle ; je le vois qui se lève; il me dit : tu fais bien. Il rit à la fortune de César. Les dieux font payer trop cher la fortune. Antoine, me voici, ton épouse. Mon courage veut mériter ce titre. Je suis de la flamme et de l'air. Tout ce qui pèse en moi, je le laisse à la terre et pour alimenter d'autres vies. Eh bien ! Tout est-il prêt ? Venez ! Cueillez la dernière chaleur de ma lèvre. Bon voyage, aimable Charmion ; Iras, adieu... (Iras tombe et meurt.) Eh ! quoi ! Suis-je un aspic ! Mon baiser l'a tuée ! Quoi le nœud si facilement se défait ? Ah ! vraiment ton étreinte, ô mort, est pareille à celle d'un amant ; elle blesse, mais on la désire. Iras, oh ! comme elle est tranquille. Tu pars si doucement, comme pour montrer que le monde ne vaut pas qu'on lui dise adieu.

    Charmion. — Nuages épais, répandez vos averses, et qu'elles soient comme les larmes des dieux,

    Cléopatre. — Oh ! lâche que je suis de me laisser devancer par elle. Si maintenant elle rencontre avant moi mon Antoine aux belles boucles, elle me volera peut-être ce baiser dont je veux faire tout mon ciel. Viens, vermisseau mortel !

    (Elle applique l'aspic à son sein.)

    Ta dent aiguë saura trancher d'un coup le fil tenace de la vie. Fâche-toi, pauvre fou venimeux ! Finissons-en ! Que ne peux-tu parler ! tu me dirais : ah ! quel grand niais malavisé que ce César.

    Charmion. — Etoile du levant !

    Cléopatre. — Silence ! Silence ! Regarde : sur mon sein le nourrisson s'endort en tétant sa nourrice.

    Charmion. — Mon cœur se fend.

    Cléopatre. — Suave comme la myrrhe, aussi subtil que l'air, aussi doux... Marc Antoine ! (Elle applique à son bras un second aspic.) Viens ! je vais te nourrir aussi. Pourquoi demeurer plus longtemps...

    (Elle meurt.) »


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